L’affaire du possible « trésor de Lorient » découvert dans les archives municipales ravive la mémoire d’une période sombre mais déterminante : celle de la Seconde Guerre mondiale, quand Lorient était l’un des verrous stratégiques du Reich en Europe de l’Ouest.
Pour comprendre pourquoi des officiers allemands auraient pu y cacher une « réserve de valeurs », il faut revenir sur le rôle unique que jouait la ville en 1944.
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Une base sous-marine au cœur du dispositif allemand
Dès 1940, Lorient devient un point névralgique de la guerre sous-marine. Le port, sa rade et sa situation géographique en font un emplacement idéal pour la Kriegsmarine, la marine allemande.
Les Allemands y construisent la base de Keroman, un ensemble de bunkers gigantesques, abritant les redoutables sous-marins U-Boote chargés d’attaquer les convois alliés.
Sous la direction de l’amiral Dönitz, Lorient devient une véritable forteresse du mur de l’Atlantique. La ville est alors totalement militarisée : on y trouve les quartiers généraux, des dépôts logistiques, des ateliers, des hôpitaux militaires, et surtout… des bureaux administratifs chargés de la gestion des biens réquisitionnés.
Une ville rasée, mais un port imprenable
À partir de janvier 1943, les Alliés multiplient les bombardements sur Lorient. La ville est presque entièrement détruite, mais la base sous-marine, protégée par plusieurs mètres de béton, reste indestructible.
Lorient devient alors une poche de résistance allemande : encerclée à partir d’août 1944, elle ne se rendra que le 10 mai 1945, après la capitulation générale du Reich.
Durant cette période d’isolement, les officiers allemands restés dans la poche auraient cherché à protéger leurs archives, leurs fonds et leurs biens de valeur, anticipant la défaite.
C’est précisément dans ce contexte que les documents retrouvés par Jean Guilbert, celui qui a trouvé la piste du « Trésor du Faouëdic » mentionnent une “réserve de valeurs” et un emplacement incombustible sous un bâtiment civil.
Une administration allemande aux multiples dépôts
Les services allemands à Lorient géraient aussi bien les approvisionnements de la base que les ressources financières de l’armée.
Le tampon retrouvé par Jean Guilbert, « Kommandantur Lorient / Dienststelle Schiffsversorgung », confirme qu’il s’agissait bien d’un bureau logistique naval.
Il est donc plausible que des titres financiers ou bons du trésor aient été stockés, voire dissimulés, dans des locaux civils ou municipaux.
De la guerre au mythe
Au fil des décennies, l’histoire de Lorient 1944 a souvent été racontée sous l’angle militaire.
Mais les archives exhumées aujourd’hui rappellent qu’au-delà des bombes et des bunkers, il existait aussi une économie de guerre, faite de documents, de valeurs et de transactions.
Si le “trésor de Lorient” existait vraiment, il serait avant tout un témoignage matériel de cette période : un vestige administratif devenu légende locale.
Pour les historiens, c’est une hypothèse plausible : la base de Keroman était un coffre-fort de béton ; il n’est pas impossible qu’un autre trésor, plus discret, ait été enfoui dans ses environs.


